Qu’est-ce qu’un chalut électrique ?

Un chalut est à la base un grand filet en forme d’entonnoir remorqué à l’arrière d’un navire. Pour cette technique, il s’agit précisément d’un chalut à perche. Il est caractérisé par la présence d’une grande perche rigide aidant à l’ouverture du filet. Assemblée avec des chaines, elle permet de gratter le fond et de faire sortir les poissons plats démersaux (soles, plies, etc.) et crevettes, ciblés par cette technique.

Le chalut électrique a été conçu dans le but de réduire l’impact écologique sur l’écosystème et d’améliorer le rendement énergétique du bateau. Le principe de cette pratique consiste à placer des électrodes le long du filet. Le courant passe alors dans les mailles et est diffusé sur le fond, l’impulsion électrique va alors paralyser le poisson, le propulser hors du substrat sableux dans le chalut.

Qui utilise le chalut électrique ?

Depuis 2006, la Commission européenne a donné à titre expérimental, des dérogations pour chaque état membre pêchant en zone Sud de la Mer du Nord. Officiellement, chaque pays européen concerné pourrait équiper 5% de sa flottille de chalut à perche avec des électrodes. Les pêcheurs français et anglais n’utilisant que très rarement cette technique, ces autorisations ont principalement servi à la flottille néerlandaise qui aurait équipé abusivement 30% de leur flottille.

Depuis la mise en place de ces dérogations, les pêcheurs néerlandais souhaitent inscrire cette technique comme une méthode de pêche conventionnelle auprès de la Commission européenne. Cette proposition permettrait l’utilisation de la « pêche électrique par impulsions » de façon légale par l’ensemble de leur flottille.

Pourquoi un débat existe-il autour de cette technique ?

De plus en plus de pêcheurs riverains de la Mer du Nord se mobilisent contre l’usage de cette technique de pêche. Parmi leurs revendications, il semblerait que dans les zones où cohabitent le chalut électrique et d’autres méthodes (filets, chalut de fond), la biomasse de poissons plats soit en déclin. En comparant les quantités pêchées par chacune des méthodes, il apparaît que la pêche électrique soit très efficace et sans commune mesure avec les méthodes conventionnelles. De plus, les pêcheurs mettent en avant l’impact physique de cette technique sur les organismes (fractures, brûlures, etc.).

A l’inverse, les néerlandais mettent en avant l’impact positif de cette technique au niveau écologique et économique. En jouant sur le voltage diffusé dans le chalut, les pêcheurs néerlandais estiment qu’ils peuvent sélectionner les grands individus (selon la taille, le taux de gras…) et donc relâcher les poissons n’ayant pas atteints la taille commerciale. De plus, l’impulsion permettant de faire « sortir » les poissons plats, les contacts entre la perche et le sol sont limités. Au niveau écologique, cette technique réduit donc son impact sur les fonds marins et permet d’un point de vue économique, de diminuer la consommation de carburant du navire.

Aujourd’hui, deux opinions s’affrontent : l’une voulant l’interdiction totale de cette technique et l’autre souhaitant sa légalisation et son intégration comme méthode de pêche conventionnelle.

Toute la filière française s’est engagée contre cette technique auprès des pêcheurs professionnels. Après plusieurs années de mobilisations, les 3 institutions européennes (Commission, Conseil et Parlement européens) ont décidé conjointement le mercredi 12 janvier d’une interdiction totale de la pêche électrique d’ici juin 2021. Pendant ces deux années de transition, la réglementation va être strictement appliquée aux Pays-Bas : seulement 5% de la flotte recevra une dérogation pour être autorisé à utiliser un chalut électrique.

Le 16 avril 2019, le Parlement européen a approuvé l’accord de trilogue conclu le 13 février 2019 sur le règlement « Mesures techniques », A partir du 1er juillet 2021, l’utilisation du chalut électrique sera interdite définitivement dans les eaux européennes.

Le jeudi 9 mai 2019, les députés de l’Assemblée Nationale Française ont voté à l’unanimité, la proposition de loi sur l’interdiction de la pêche électrique dans les eaux territoriales françaises dès cette année. Le texte permet d’avancer la date d’interdiction votée le 16 avril dernier au niveau de l’Union européenne, qui ne sera effective que le 1er juillet 2021.

Cette loi française, si elle est définitivement adoptée par le Sénat, permettra d’interdire cette pêche, dans les eaux territoriales françaises (12 milles marins bordant le littoral) à compter de sa publication. »

Quelle est la position du programme Mr.Goodfish ?

Suite aux dernières notes du CIEM (Conseil International pour l’exploitation de la Mer) et de l’IFREMER (Institut Français Recherche Exploitation de la Mer) en ce qui concerne l’utilisation d’engins de pêche à impulsions électriques, Mr.Goodfish rejoint les avis des experts scientifiques et recommande la prudence.

En effet, les précédentes études réalisées sont basées sur des observations ou expérimentations peu nombreuses. Certains effets restent à être étudiés, comme l’impact de l’utilisation de ces engins à moyen et long terme notamment sur la reproduction (maturité sexuelle, etc…) ainsi que sur le développement des œufs et larves. Des effets négatifs sur ces phases du cycle de vie seraient préoccupants pour le renouvellement des populations.

Des analyses concernant les perturbations du système immunitaire doivent également être réalisées. De façon plus générale il est plus que nécessaire d’étudier l’impact de cette pratique qui pourrait avoir des effets catastrophiques sur la faune benthique, la méiofaune, le réseau trophique et le fonctionnement de l’écosystème.

Accès à la note de l’Ifremer : wwz.ifremer.fr_Pêche électrique