Comme nous le savons, les activités humaines ont un impact réel sur le climat, nous entrons dans une aire de changements globaux, les espèces qui peuplent la planète devront s’adapter. Mais qu’en est-il de l’effet du réchauffement climatique sur les ressources halieutiques ?
L’une des conséquences du réchauffement climatique est la modification des écosystèmes marins. En effet ce phénomène agit sur la température de l’eau, la teneur en oxygène mais aussi le pH des océans. Ces modifications ont un impact direct sur les organismes qui peuplent ces milieux (croissance, respiration, cycle de vie, etc.) et indirect (relations proies/prédateurs, modification des habitats). En changeant les paramètres physico-chimiques des océans, la chaîne trophique et la productivité de l’ensemble des organismes marins seront donc perturbées du phytoplancton aux grands prédateurs. Ces modifications auront un effet sur le phénomène de résilience des écosystèmes, il s’agit de leur capacité à retrouver leur fonctionnement d’origine après avoir connu un bouleversement. Les conséquences du réchauffement climatique seront donc rapidement sans retour possible.
Des constats sont d’ores et déjà établis. Ainsi depuis les cinquante dernières années nous observons un décalage des saisons avec un printemps et un été plus précoce de plus de 4 jours par décennies en moyenne. On constate aussi des déplacements de certaines espèces marines allant jusqu’à plus de 1000 kilomètres vers le nord (Poloczanska, 2014[1]). Ces migrations dans le milieu marin sont plus rapides que sur le milieu terrestre. Les poissons et invertébrés marins réagissent donc au réchauffement des océans en migrant vers des plus hautes latitudes et dans des eaux plus profondes.
Associé au changement climatique, des phénomènes naturels accentuent ces migrations telle que l’Oscillation Nord Atlantique, il s’agit d’une variation de la température de l’eau dans la direction Nord-Sud dans la zone Atlantique Nord. Actuellement dans une phase de réchauffement, elle contribue à la diminution du nombre d’espèces d’eau froide.
Selon différents modèles, pour les espèces pêchées, on pourrait observer une nouvelle répartition entre les hautes latitudes, qui connaitraient une hausse de la capacité de capture de 30 à 70 %, et les régions tropicales qui elles subiraient une baisse allant jusqu’à 40 % (Cheung et al., 2009)[2]. A titre d’exemple, d’ici 2055, les ZEE[3] de la Norvège, du Groenland, de l’Alaska aux Etats-Unis et la Russie pourraient augmenter fortement leurs débarquements à l’inverse de régions comme les ZEE de l’Indonésie, du Chili et de la Chine qui subiraient une diminution. Au niveau social, particulièrement dans la filière pêche, le réchauffement climatique pourrait accroître les disparités entre les différentes régions du monde.
Comment limiter les effets du réchauffement climatique sur la ressource halieutique ?
Il est évident qu’il faut éviter la surexploitation des stocks qui, avec le réchauffement climatique, est un facteur aggravant pour la préservation de la biodiversité. L’avenir est dans une approche écosystémique de la gestion des pêches. Cet angle d’approche permet d’avoir une vision d’ensemble de l’écosystème dans lequel cohabite un ensemble d’espèces et d’activités, en prenant en compte des paramètres comme : l’état des stocks, les interactions entre les espèces, les conditions physico-chimiques ou encore la gouvernance. Son but étant de préserver la biodiversité tout en permettant le développement économique des filières concernées.
De nombreuses études restent à mener, notamment sur l’adaptation des espèces à ces changements rapides.
Retrouvez la fiche complète de la plateforme Océan et climat ici.
[1] POLOCZANSKA E. S., HOEGH-GULDBERG O., CHEUNG W., PÖRTNER H.-O. and BURROWS M., 2014 – Cross-Chapter Box On Observed Global Responses Of Marine Biogeogra- Phy, Abundance, And Phenology To Climate Change. In Climate Change 2014: Impacts, Adaptation, and Vulnerability. Part A: Global and Sectoral Aspects. Contribution of Working Group II to the Fifth Assessment Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change, Cambridge University Press
[2] Cheung, W. W. L., Dunne, J., Sarmiento, J. L., and Pauly, D. 2011. Integrating ecophysiology and plankton dynamics into projected maximum fisheries catch potential under climate change in the Northeast Atlantic. – ICES Journal of Marine Science, 68: 1008–1018
[3] La ZEE est une bande de mer ou d’océan située entre les eaux territoriales et les eaux internationales, sur laquelle un État riverain (parfois plusieurs États dans le cas d’accords de gestion partagée) dispose de l’exclusivité d’exploitation des ressources.